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Damsels in Distress regarder en ligne avec sous-titres 1080p

Damsels in Distress

Par Bertrand Mathieux · Le 8 septembre 2013

Film de Whit Stillman
Pays. États-Unis
Année de sortie. 2011
Scénario. Whit Stillman
Photographie. Doug Emmett
Montage. Andrew Hafitz
Musique originale. Mark Suozzo
Avec. Greta Gerwig, Adam Brody, Analeigh Tipton, Megalyn Echikunwoke, Carrie MacLemore, Hugo Becker, Ryan Metcalf

Rose: Priss is a rat. A bitch. A rat bitch!

Damsels in Distress est un « campus movie » drĂ´le et – derrière son titre ironiquement naĂŻf – intelligent, qui s’affranchit des clichĂ©s et facilitĂ©s souvent associĂ©s au genre.

Synopsis de Damsels in Distress

Violet (Greta Gerwig ), Heather (Carrie MacLemore ) et Rose (Megalyn Echikunwoke ) sont trois Ă©tudiantes qui s’occupent du centre de prĂ©vention anti suicide de l’universitĂ© de Seven Oaks. Dès l’arrivĂ©e de Lily (Analeigh Tipton ), une nouvelle Ă©lève, elles vont chercher Ă  l’initier Ă  leurs nombreuses – et discutables – règles de vie.

Critique du film

Violet: Did you know that a good-smelling environment is crucial to our overall sense of well-being? Have you considered finding a better-smelling place to live?

Whit Stillman, un parcours atypique

DrĂ´le de carrière que celle du rĂ©alisateur et scĂ©nariste Whit Stillman. Après un premier long mĂ©trage (Metropolitan. 1990) rĂ©compensĂ© aux Independent Spirit Awards (meilleur premier film) et nominĂ© aux Oscars (dans la catĂ©gorie « meilleur scĂ©nario original »), il signe deux autres films sortis respectivement en 1994 et 1998 (Barcelona et surtout Les Derniers jours du disco ), qui l’affirment – du moins auprès de la critique et d’une partie du public (Les Derniers jours du disco fut un Ă©chec commercial) – comme l’un des auteurs Ă  suivre du cinĂ©ma indĂ©pendant amĂ©ricain. Son sujet de prĂ©dilection. la bourgeoisie urbaine amĂ©ricaine, qu’il Ă©gratigne gentiment Ă  travers des comĂ©dies de mĹ“urs aux personnages finement croquĂ©s. Notons que plusieurs auteurs contemporains, dont Lena Dunham (la sĂ©rie TV Girls ), citent volontiers Stillman parmi leurs rĂ©fĂ©rences. DĂ©bute ensuite une longue pĂ©riode au cours de laquelle le metteur en scène demeure muet sur le plan artistique ; en effet, pas moins de treize annĂ©es sĂ©parent Les Derniers jours du disco (que Criterion a rĂ©cemment Ă©ditĂ© en DVD/Blu-ray) de Damsels in Distress. le quatrième film de Stillman, sorti en 2011.

Greta Gerwig. des airs de Chloé Sevigny

Le casting inclut l’actrice, scĂ©nariste et rĂ©alisatrice Greta Gerwig (The House of the Devil . Frances Ha ), connue notamment pour sa contribution au mouvement Mumblecore (un sous-genre du cinĂ©ma indĂ©pendant amĂ©ricain qui se caractĂ©rise par un budget très limitĂ©, des acteurs amateurs et un recours frĂ©quent Ă  l’improvisation). Il est d’ailleurs difficile de ne pas remarquer une ressemblance entre Greta Gerwig et ChloĂ© Sevigny. que Stillman avait dirigĂ©e dans Les Derniers jours du disco. Ressemblance que le rĂ©alisateur a, selon ses propres dires, volontairement cherchĂ© Ă  accentuer ( ChloĂ© et Greta ont toutes deux le don d’exister Ă  l’Ă©cran d’une manière intĂ©ressante. […] je pense que nos choix en termes de maquillage et d’habillage les ont faites se ressembler davantage encore ; source. Gerwig like Sevigny, says director ). Les deux comĂ©diennes font par ailleurs des choix artistiques comparables Ă  certains Ă©gards, et si Sevigny est depuis une bonne dizaine d’annĂ©es une figure importante – voire une icĂ´ne – du cinĂ©ma indĂ©pendant amĂ©ricain, Gerwig semble clairement en passe de le devenir Ă  son tour.

Greta Gerwig dans « Damsels in Distress »

De l’art d’affiner progressivement les contours

Damsels in Distress s’inscrit dans la mĂŞme veine que les prĂ©cĂ©dents films de son auteur, Ă  savoir la comĂ©die de mĹ“urs – style auquel la sociĂ©tĂ© amĂ©ricaine, connue pour ses extrĂŞmes et ses paradoxes, offre un terrain fertile. Ce « campus movie » atypique, rĂ©vĂ©lant une qualitĂ© d’Ă©criture que l’on n’associe pas spontanĂ©ment au genre, nous dĂ©peint de jeunes amĂ©ricaines « modèles » obsĂ©dĂ©es par l’hygiène et les apparences, prĂ´nant une vision du bonheur et de la morale codifiĂ©e Ă  l’extrĂŞme, et dĂ©clamant avec une conviction dĂ©routante de très discutables « vĂ©ritĂ©s » toutes faites. Si le film Ă©pingle leurs contradictions et leurs discours caricaturaux et arrogants dans une succession de scènes dĂ©calĂ©es, ponctuĂ©es de dialogues au cordeau, Stillman ne mĂ©prise pour autant pas ses personnages, posant sur ces derniers un regard certes parfois moqueur mais non dĂ©pourvu de tendresse et de comprĂ©hension – et c’est dans cette combinaison dĂ©licate que Damsels in Distress puise une grande partie de son charme.

Entrant très rapidement dans le vif du sujet, Stillman nous met d’emblĂ©e face Ă  des situations très caricaturales, voire absurdes, et il parvient Ă  maintenir l’intĂ©rĂŞt du spectateur sur toute la durĂ©e du film en choisissant non pas la surenchère mais, au contraire, en affinant au fur et Ă  mesure son propos et ses personnages. Son talent rĂ©side dans cette manière d’instiller de la nuance dans la caricature, de l’humanitĂ© dans les stĂ©rĂ©otypes, de l’empathie dans la critique. C’est lĂ  une des clĂ©s pour rĂ©ussir une comĂ©die de ce genre. ne pas hĂ©siter Ă  forcer le trait pour crĂ©er l’effet comique, puis ajouter des motifs plus nuancĂ©s pour donner de la crĂ©dibilitĂ© et de la consistance Ă  l’ensemble.

Analeigh Tipton et Megalyn Echikunwoke dans « Damsels in Distress »

Stillman joue par ailleurs intelligemment avec les aprioris des spectateurs, donnant ainsi Ă  son propos sur les apparences d’autant plus de vie et de relief. Il parvient mĂŞme Ă  glisser des sĂ©quences musicales qui fonctionnent très bien, puisque parfaitement intĂ©grĂ©es au rĂ©cit et utilisĂ©es avec parcimonie – le choix des musiques est d’ailleurs plutĂ´t en dĂ©calage vis-Ă -vis de l’Ă©poque (contemporaine) Ă  laquelle se dĂ©roule l’action du film, ce qui donne Ă  Damsels in Distress un agrĂ©able cachet anachronique.

Il serait toutefois injuste de n’attribuer qu’Ă  Stillman la rĂ©ussite indĂ©niable de Damsels in Distress. le jeu des comĂ©diens sert remarquablement bien la plume Ă  la fois affĂ»tĂ©e et attendrie de l’auteur. La talentueuse – et très jolie – Greta Gerwig parvient Ă  donner une vĂ©ritable Ă©paisseur Ă  un personnage qu’une actrice moins douĂ©e aurait Ă©tĂ© tentĂ© de rendre plus caricatural. A ses cĂ´tĂ©s, la comĂ©dienne, mannequin et patineuse artistique Analeigh Tipton livre Ă©galement une excellente prestation, tandis que le reste du casting – dont Adam Brody, Megalyn Echikunwoke, Hugo Becker, Ryan Metcalf, Jermaine Crawford (connu notamment pour son rĂ´le dans l’excellent sĂ©rie The Wire ) et Carrie MacLemore – compose une truculente galerie de personnages secondaires.

EspĂ©rons que Whit Stillman ne restera pas une nouvelle fois absent des plateaux de tournage pendant une dĂ©cennie, car Damsels in Distress justifie pleinement la reconnaissance critique que son auteur avait acquise au cours des annĂ©es 90. Quant Ă  Greta Gerwig, elle a depuis jouĂ© dans l’excellent Frances Ha . de Noah Baumbach, dont elle a cosignĂ© le scĂ©nario.

Ă€ propos du titre

Le titre du film fait directement rĂ©fĂ©rence Ă  l’expression « demoiselle en dĂ©tresse », un clichĂ© culturel mettant en scène un hĂ©ros masculin venant en aide Ă  une femme sans dĂ©fense, menacĂ©e par un ennemi quelconque. Cette situation stĂ©rĂ©otypĂ©e se retrouve dans un très grand nombre de tableaux, romans et films, et ce Ă  diffĂ©rentes Ă©poques.

« Saint Georges, la princesse et le dragon », peinture de Paolo Uccello. Une reprĂ©sentation cĂ©lèbre de la « demoiselle en dĂ©tresse ».

Dans le film de Stillman, l’expression damsels in distress » a une rĂ©sonance ironique, notamment car les personnages masculins du film n’ont rien d’hĂ©roĂŻques, et sont mĂŞme souvent Ă©tranges, simplets ou dĂ©passĂ©s par les Ă©vĂ©nements. Dans le mĂŞme temps, les personnages fĂ©minins, pleins de doutes et de contradictions, ne reprĂ©sentent pas l’archĂ©type de la « femme forte » revendiquĂ©e par certaines fĂ©ministes. D’une certaine manière, Whit Stillman renvoie donc dos Ă  dos deux stĂ©rĂ©otypes culturels opposĂ©s.

7.5 Note globale

Par sa capacité à dessiner, à travers des situations comiques et absurdes, le parcours de personnages qui gagnent peu à peu en épaisseur, Damsels in Distress s'affirme comme une comédie de mœurs à la fois rafraîchissante, élégante et sophistiquée.